Sista Tchad est l’une des reines du dancehall Gwada, elle a du flow, du style et de l’humour. Présentation de la Gwadamuffin Lady
D’où vient ton nom ?
"Tchad là" c’est une expression au pays, c’est être dans un état second être "chiré", j’essai de donner ce "tchad" à travers mes lyrics! C’est aussi le nom d’un pays Africain qui me permet de représenter nos origines!
Raconte nous ton parcours musical, et notamment ton passage au sein du crew Neg Radikal.
J’ai été attirée très jeune par le chant et j’ai fait mes premiers pas à la chorale de l’église de Port-Louis! Adolescente je suis partie à Paris et j’ai intégré un groupe "Messagers de Jah" composé à l’époque de Poupa Cee et de DiFanga, en 1992. De retour en Guadeloupe j’ai pris contact avec les Sounds System, qui étaient 3DOM Sound (situé en Basse-Terre) et Neg Radikal (de Grande-Terre), c’était en 1994. Dû à la proximité, j’ai finalement intégré le groupe Neg Radikal. A l’époque le crew était composé de Lion P et de L’Empereur, tous deux originaires de la Martinique. Lors d’un sound sur la plage de Deshais où Lion et L’Empereur « représentaient » énergiquement la Martinique (normal!), j’ai décider d’y rajouter la touche Gwada, c’est par ce moyen que je tenais mon ticket d’entrée!
Ma première apparition discographique date de 1996, sur la compilation Karukéragga produite par le crew Ragga Dub Force, ou j’interprétais le titre "Femme Battue".
Par la suite avec Lion P, j’ai écumé tous les sounds des Antilles à la Guyane, jusqu’à la sortie du morceau "Bip-Bip" qui nous fit découvrir au grand publique en 1997. Ce fût un réel succès! Ce fût par ailleurs ma première expérience de co-production avec à l’époque la maison de disque Déclic Communication. Durant cette période Clash, Daddy X et Romeo ont rejoint le crew. Lion P et moi étions les leaders du groupe, et en même temps nous ressentions le besoin de faire plus de titres en solo.
C’est ainsi qu’en 1998 nous avons pris la décision de créer le groupe Radikal Neg’, composé cette fois ci de Daddy X, Roméo et moi-même. Dans la même année nous sortions l’album "Tchèk Ca" ou j’ai pu enregistrer deux titres solo "Tou Lé Jou" et "Beat" qui fût le sujet de la presse locale. Ce fût pour moi une bonne expérience artistique, car j’avais enfin l’opportunité de défendre mes idées et de m’affirmer comme premier deejay féminin de l’île! Malheureusement la maison de disque (Moradisc) n’a pas suivit sur la promo, ils n’y ont pas cru! Et l’aventure Radikal Neg’ s’arrête là…
A la même époque j’étais à la base de la création du premier « Sounds Sistas » avec Ladie Kannel et Ladie Sound Kill. Nous avions également une formation live 100% "Ladies" appelé Ladies Roots.
Durant la même année j’ai entamé le tour de la Guadeloupe avec le "Man Yvan Sound Tour" , un groupe de live destiné à backer les deejays, majoritairements issus des quartiers tels que Boissard, Karénaj’, Lacroix…
C’est en 1999 que j’ai intégré le sound system Kilowax avec lequel j’ai enregistré de nombreux Dub-Plates, et réalisé une tournée de Gwada à Paris. Depuis Kilowax Music est le Label avec lequel je réalise et co-produit mes différents projets.
Quelles sont tes inspirations ?
Je m’inspire surtout de mon quotidien, de faits divers. Mais surtout j’aime, comme on dit chez moi, "tchoké lé bobo!", c’est à dire, mettre le doigt là où ça blesse, le tout avec une touche d’humour, en général! Je suis une chroniqueuse humoristique! Je peux aussi traité de thèmes plus "fun" destinés à faire bouger les massifs! Je me sens vraiment être un témoin du quotidien de la vie guadeloupéenne, et j’essaie de la retranscrire au mieux.
Comment en es tu venu à faire le titre « Ren La » ?
« Ren Là » c’est une scène que j’ai réellement vécue! En voyant cette fille se plaindre pour ses allocations et utiliser le terme "ban moin lajan a koud’ ren là"(lui donner l’argent de son coup de rein!), l’idée est venue tout naturellement! Il me fallais parler de ce rapport d’argent qui existe entre les femmes et les hommes, et de celui qui existe entre les femmes et l’Etat! C’est quelque chose de réel ici! Ensuite Major Skat m’a proposé un titre à consonnance Salsa afin de véhiculer une tendance Caraïbéenne!
Comment travailles tu tes lyrics ?
Je n’ai pas de méthode pré-définie, je peux être inspiré par un thème musical, ou au contraire avoir une mélodie et un thème en tête. Ensuite, j’essaie differentes instrus puis on entame une composition "sur-mesure". J’aime être seule pour écrire, d’ailleur je dispose d’un magnéto multipistes afin d’enregistrer tous mes premiers jets, il faut que ça soit spontané! Ensuite je peaufine et on passe aux arrangements de l’instrumental, et cela jusqu’à satisfaction! En général mes proches sont les premiers à qui je demande leur impression avant la sortie d’un titre…
Tu travailles avec Major Skat depuis combien de temps ?
Je travaille avec Major Skat depuis 1999. On s’était déjà croisé à l’époque de 3Dom Sound, mais on ne bossait pas ensemble.
Parles nous du Kilowax Sound System.
A la base Kilowax est le sound de Major Skat, sélecteur et Maître de Cérémonie! Il est le premier à avoir enregistré les Dub-Plates en Kréyol et ce depuis qu’il était le sélecteur de 3Dom Sound avec Dalton. Logiquement, des deejays tels que Bronx MC, Slikee, Lt Willa, Tiwony et beaucoup d'autres enregistraient pour lui et tournaient avec le Kilowax sound. En 1999 Major Skat me proposa d’intégrer le sound comme deejay résidant. Kilowax est un sound qui a la particularité de jouer pour un publique majoritairement féminin! Les sélections vont souvent des standards classiques en passant par des lovers tunes, des remix hip-hop reggae, des dub-plates et surtout une bonne ambiance jusqu’au lever du jour!
Quels sont tes projets ?
Depuis un an je suis de retour sur la scène commerciale avec le maxi CD "Ren Là". Je suis co-productrice de ce projet, sortit sur le label Kilowax Music. L’auto-production demande de s’impliquer à tous les niveaux, et je viens de boucler une année de tournée dans les antilles française. Je dois continuer à être disponible pour faire connaître "Ren Là" hors des antilles, et en même temps préparer mon nouvel opus. Je prévois une nouvelle galette avec des titres un peu plus personnels, tout en poursuivant ma recherche d’originalité musicale. Ne vous inquiétez pas la Gwadamuffin’ Lady ne tardera pas à débarquer chez vous avec de nouvelles chroniques!